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La tribune de Corinne Lepage

La bataille pour des registres de pathologies

publié le 11/12/2019 | par Corinne Lepage

La bataille pour obtenir que des registres dignes de ce nom , permettant de suivre les malformations congénitales et les cancers sur l’ensemble du territoire français, métropole et outre-mer est lancée. En effet, il faut savoir que nous ne disposons que de registres couvrants moins de 20 % de la population pour ces deux types de pathologies, ce qui est notoirement insuffisant.

La bataille pour obtenir que des registres dignes de ce nom , permettant de suivre les malformations congénitales et les cancers sur l’ensemble du territoire français, métropole et outre-mer est lancée. En effet, il faut savoir que nous ne disposons que de registres couvrants moins de 20 % de la population pour ces deux types de pathologies, ce qui est notoirement insuffisant.

Or, cette question des registres est très importante car il s’agit en réalité de pouvoir établir des corrélations entre des territoires et des pathologies puis, de pouvoir regarder si au-delà des corrélations, il pourrait exister des liens de causalité entre des pathologies et des circonstances locales particulières qu’elles touchent l’air, l’eau ou le sol, qu’elles soient de nature industrielle, agricole ou encore historique.

Nous avons une fâcheuse tendance à nous débarrasser des thermomètres, a fortiori, quand ils sont indépendants des autorités politiques. ! Rappelons pour mémoire que l’IFEN, Institut Français de l’Environnement a disparu corps et biens en 2003 sans être remplacé par un organisme indépendant puisque c’est désormais le ministère de l’écologie qui est chargée de cette mission qui n’est remplie que partiellement si l’on regarde les publications de l’Agence européenne de l’Environnement.

Dans le domaine médical, il en va de même. L’absence de registres, et surtout de registres tenus par des organismes indépendants, ,a été dénoncée par le REMERA. Il n’est pas admissible que la réponse donnée à des parents dont les enfants souffrent de malformations dans des conditions apparemment anormales (compte tenu du nombre et de la localisation) soit « c’est la faute à pas de chance » ou on ne sait pas. Seule, la mise en place de registres sur tout le territoire permettrait, peut-être, de comprendre et par voie de conséquence d’anticiper. Mais, bien entendu, ces registres comme ceux du cancer pourraient permettre de mettre le doigt sur la conséquence de l’utilisation de certains produits, qu’il s’agisse de pesticides, de perturbateurs endocriniens, de promoteurs d’HAP, de dioxines ou de métaux lourds pour ne prendre que les exemples les plus évidents.

On peut comprendre, sans évidemment légitimer, l’opposition manifestée par les différents lobbys. En revanche, on ne peut pas comprendre l’opposition de l’État, qui renvoyant de commission en commission le sujet, tergiverse certes pour éviter de dépenser les quelques dizaines de milliers d’euros qui seraient nécessaires (pourtant, quelles économies en termes humains et même en termes dépenses sociales nous pourrions alors faire), mais surtout pour éviter d’aborder les sujets qui fâchent.

La saisine du juge administratif par plusieurs associations de médecins (auxquelles d’autres pourraient se joindre) permettra d’exiger un débat contradictoire sur le sujet devant un juge sans attendre le renvoi à une nouvelle commission éventuelle.

Le sujet intéresse bien entendu aussi les allergologues et les spécialistes de la pollution de l’air. Bien que les études soient très riches sur l’impact sanitaire de différents polluants atmosphériques, la mise en place de registres permettant d’établir des cartes de pathologies qui puissent être reliées à des polluants particuliers.

Mais, une telle vision impliquerait une politique de prévention matière de santé publique différente de celle qui est menée aujourd’hui ou plutôt qui n’est pas menée. Les registres sont donc un excellent thermomètre non seulement de la santé de notre pays mais de la manière dont celle-ci est appréciée par les pouvoirs publics

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