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La tribune de Corinne Lepage

Les liens santé/ biodiversité

publié le 07/09/2021 | par Corinne Lepage

Le sujet de la biodiversité est dans l’actualité à plus d’un titre. Les mégafeux de l’été, les phénomènes extrêmes rencontrés au Canada avec des températures de plus de 50° et en Europe avec les inondations catastrophiques d’Allemagne et de Belgique ont mis en lumière pour ce qui en aura encore douté les effets redoutables du dérèglement climatique. Les effets ont été également dévastateurs pour les espèces animales et végétales et, pour ne prendre que le cas de la France, l’incendie du Var a été dramatique pour la réserve naturelle ravagée par les flammes. La tenue du congrès mondial de l’UICN à Marseille puis de la COP 15 (équivalent pour la biodiversité des COP climat) à Kunming en novembre puis en avril 2022 sont autant d’occasion de partager les connaissances sur un état des lieux catastrophiques et surtout de mettre en place enfin des mesures contraignantes non seulement de préservation mais également de reconquête des habitats détériorés.

Les liens entre climat et biodiversités sont désormais parfaitement acquis. Il conviendrait qu’il en aille de même des rapports entre la santé et la biodiversité.

La pandémie de covid 19 a été l’occasion de mettre en lumière les liens entre perte de biodiversité, zoonoses, et pandémies .L’IPBES prévient dans un rapport publié en octobre 2020 que « des pandémies apparaîtront plus rapidement , causeront plus dommages à l’économie et tueront plus de personnes que le virus actuel. »

Les experts soulignent que 70 % des maladies émergentes et presque toutes les pandémies communes sont des zoonoses ; ils estiment à 1,7 million le nombre de virus non découverts actuellement présents chez les mammifères et les oiseaux dont plus de 600 000 pourraient avoir la capacité d’infecter les humains. La Fondation pour la recherche sur la biodiversité souligne la corrélation entre la perte de biodiversité à toute allure (1 million d’espèces vivantes menacées) et l’apparition de 35 nouvelles maladies chaque année. Or, la destruction des milieux naturels et le changement d’usage des sols sont des facteurs de développement des zoonoses. « Si l’habitat d’une espèce et ses ressources alimentaires s’amenuisent, elles peuvent être amenées à se rapprocher de l’homme ce qui facilite le passage d’agents pathogènes de l’animal à l’humain » (Hélène Soubelet directrice de la fondation pour la recherche de la biodiversité in Essentiel santé magazine 15 mars 2021).

Les pratiques agricoles jouent également un rôle important dans l’émergence des nouvelles maladies infectieuses et en particulier l’élevage intensif . La promiscuité et le stress diminuent l’immunité, l’absence d’accès à une alimentation diversifiée , une érosion génétique chez les animaux sont autant de facteurs conduisant à une diffusion extrêmement rapide des pathologies.

Le réchauffement climatique lui-même influence également les espèces et la diffusion de certaines zoonoses en particulier celles qui sont dues aux moustiques et qui augmentent avec la température.
La prolifération d’espèces invasives est un facteur supplémentaire de diffusion de maladies comme l’écureuil de Corée à l’origine des tics eux- même agents de la maladie de Lyme.

Les liens entre le changement climatique et la santé induisent un cercle vicieux :l’expansion des insectes vecteurs de microbes infectieux résulte de la hausse des températures, des sécheresses qui incitent à stocker l’eau dans des citernes qui entraînent une prolifération des moustiques et les pluies créent des points favorables à leur développement. La dengue, la fièvre jaune, l’encéphalite de West Nike, l’encéphalite étatique, la fièvre de chikungunya sont autant d’exemples de maladies déjà développées qui vont augmenter avec le changement climatique. Et bien entendu, l’impact du changement climatique très important sur l’eau et donc sur la nourriture induisent le développement de la malnutrition et de la dénutrition qui elles même facilitent le développement des pathologies.

Ainsi, le monde médical devrait-il être le premier défenseur de la biodiversité dans la prévention, dans tous les sens du terme, commence avec un bon état conservation de la nature.

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