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Lutte contre le changement climatique et contre la pollution de l’air: même combat

publié le 13/02/2019 | par arcaa

La lutte contre la pollution de l’air et la lutte contre changement climatique sont deux politiques prioritaires qui doivent être impérativement coordonnées, car l’interaction de ces deux fléaux est patente, certaines mesures prises dans un domaine peuvent se révéler négatives dans l’autre et seule une coordination des politiques peut permettre une effectivité.

Sans aller jusqu’à soutenir comme le font certains que la pollution de l’air est la principale cause du réchauffement climatique ( J. Marvin Herndon ( Journal of Geography, Environment and Earth Science International,) au motif que l’augmentation des particules aérolisées est principalement responsable de l’augmentation du réchauffement planétaire, les études montrent que l’ozone troposphérique (par opposition à l’ozone stratosphérique qui nous protège des rayons UV) est un facteur d’accroissement des gaz à effet de serre comme il est un polluant atmosphérique au même titre que les particules fines, les oxydes d’azote, les oxydes de soufre ou les COV. Les particules fines, particulièrement mise en cause dans les pathologies pulmonaires et cardiaques ont un impact sur l’effet de serre. Ainsi, les principaux polluants locaux de l’air sont aussi des facteurs contributifs du dérèglement climatique. Quant au dérèglement climatique, ses effets délétères sur la santé humaine sont désormais parfaitement connus : la hausse des températures entraîne une augmentation des pollutions locales, les phénomènes extrêmes et en particulier les incendies sont une source de pollution atmosphérique locale et la très grande sécheresse augmente considérablement les poussières.

Malheureusement, les mesures prises pour lutter contre le changement climatique peuvent se révéler très négatives pour la pollution de l’air.

Ainsi, la combustion de la biomasse, favorable à la réduction des GES est-elle un facteur important de pollution de l’air en raison des particules fines, en l’absence de technologies permettant de les piéger. De même, le développement massif de l’énergie nucléaire, pauvre en émissions de CO2 est-il un facteur d’émissions massives dans l’atmosphère de gaz chimiques et radioactifs , certes qui respectent des normes, mais dont l’effet cocktail n’a jamais été évalué. La dieselisation du parc automobile, délétère pour la pollution de l’air et la santé humaine a trouvé sa justification dans un impact moindre que l’essence en termes climatiques. D’autres exemples pourraient encore être donnés. En sens contraire, des mesures destinées à réduire la pollution atmosphérique peuvent être de très grosses consommatrices d’énergie et contribuer ainsi à renforcer les émissions globales de GES.

Il n’est évidemment pas question de choisir entre ces deux priorités mais au contraire de les porter simultanément pour créer des synergies et des renforcements d’efficacité. L’International institute for applied systems analysis (IIASA) a démontré récemment qu’une telle recherche était possible efficace (actu environnement . L’Union Européenne a dès 2005, dans la stratégie thématique européenne pour la pollution atmosphérique, souligné l’intérêt et l’importance de faire progresser les connaissances et de recherches de synergies entre politique de gestion de la qualité de l’air et politique de lutte contre changement climatique.
Tout d’abord, il est clair que les connaissances doivent progresser dans la mesure où les interactions sont identifiées mais peu quantifiées. La réduction des sources de CO2 est un impératif climatique majeur qui doit être corrélé avec une réduction des Nox, des particules et du méthane. Les mesures d’d’atténuation des émissions doivent être combinées avec des mesures d’adaptation, définies notamment en fonction des impacts sur la durée et sur la
santé des différents polluants. Corrélativement, une réflexion sur l’échelon pertinent d’action, avec une combinaison bottom up/ top down doit être menée pour déterminer les priorités en matière d’investissement et de réglementation.

Ainsi, peut-être mettra-t-on un terme aux aberrations que constituent les impacts négatifs des quelques décisions réellement prises pour s’attaquer au dérèglement climatique et à la multiplication des pathologies liées à la pollution de l’air.

Corinne Lepage
Ancienne Ministre de l’Environnement
Huglo Lepage Avocats

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