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Histoire d'allergies

Mon chien

publié le 08/01/2020 | par Michèle Pipart

ALLERGIQUE ? Histoires et nouvelles pour petits et grands.
L’auteure nous emmène dans un monde allergique vivant, drôle, émouvant, à travers des scènes imaginaires ou de la vie quotidienne.Ces courtes histoires sont rythmées par les saisons en commençant par le printemps.

Amtaro est Mon chien, enfin presque car il a 11 ans et a 3 ans de plus que moi. En fait, c’est mon grand frère qui l’a appelé Amtaro car c’était l’année des A et il était fan d’un dessin animé dont le héros se nommait Hamtaro. Mon frère , il est vraiment pas doué en orthographe….

Amtaro est un labrador, tout gentil, tout doux, un peu sourd, peut-être pas très obéissant et glouton mais c’est vraiment mon meilleur copain.
J’habite une toute petite ville du Jura et mon frère a été obligé en septembre d’aller en internat car il n’y a pas de lycée ici.
Amtaro c’est à lui que je raconte toutes mes histoires d’école avec mes copains. Maman travaille et elle n’a pas beaucoup de temps à me consacrer. Amtaro est devenu un gros pépère car il a du mal à bouger, il a une « dysplasie de hanche » et passe ses journées dans le salon, sur le tapis, la tête sur son oreiller. Quand maman lui donne un gâteau, en rigolant elle compte : « 1,2,3,4,5, c’est bon j’ai encore tous mes doigts…. » c’est vrai qu’il a une sacrée mâchoire.

Quand j’étais bébé, je faisais des « bronchites asthmatiformes » et maman m’a raconté qu’elle voulait donner Amtaro à une amie, car elle craignait que je sois allergique aux poils. C’est vrai qu’il en perd tout le temps…. Mais heureusement, l’allergologue avait dit qu’il ne s’agissait pas d’une allergie au chien et je n’ai pas fait de crises d’asthme depuis ma petite enfance.

Maman vient de rentrer du travail, elle a mis plus longtemps que d’habitude car il a vraiment beaucoup neigé depuis une semaine. La hauteur de neige dans le jardin est de 80cm , cela fait plusieurs années qu’il n’a pas neigé autant chez nous.
« Tu es bien rentré, mon poussin??? » L’école est à 500m et je rentre avec Alphonse et sa

maman qui me laissent devant la porte. Ils attendent que je sois rentré dans la maison et qu’ils aient entendu le verrou se refermer derrière moi ( c’est Alphonse qui m’a dit ça…) J’ai la clé de la maison suspendue au cou par un ruban. Mais à l’école, presque tous, nous avons la clé de chez nous en pendentif.

Maman a rangé la voiture sous l’abri et appelle Amtaro pour qu’il aille faire pipi dans le jardin .
Tout est silence autour de nous, car la neige tombée en abondance amortit les bruits. C’est vrai qu’il n’y a pas beaucoup de voitures qui passent dans la rue, car notre maison est en périphérie de la ville, en bordure de forêt. Dehors, les lampadaires de l’éclairage public répandent une lumière orangée qui me fait un peu peur, c’est un peu sinistre dehors. Même les sapins dégoulinent d’orange, avec la neige. J’ai l’impression qu’ils saignent et d’être dans un dessin animé tellement l’ambiance est surréaliste.

 » Mon poussin, tu peux faire remonter Amtaro, car il fait vraiment froid dehors. le thermomètre extérieur affiche -6°C » . « Amtaro, tu rentres, dépêches-toi, je caille  » Je suis en chaussons et en pyjama et je n’ai pas mis ma robe de chambre. Même dans le garage j’ai froid.  » Amtaro, Amtaro!!! » « Maman, il ne veut pas rentrer !!! ».
Maman descend avec la grosse lampe de poche, car ce coquin parfois aime aller au fond du jardin pour fouiller dans le tas d’épluchures de légumes ( le compost cela s’appelle). Tout le jardin est enseveli sous la neige et il n’y a pas de traces de pattes. De toute façon, il ne peut aller qu’au tas de compost car c’est le seul chemin fait dans la neige.
« Amtaro, Amtaro » j’entends les appels de maman et l’angoisse dans sa voix. Elle remonte précipitamment et met son gros anorak, ses grosses bottes, son bonnet et ses gants. « Viens avec moi , mon poussin, car je n’ai pas fermé le portail qui était bloqué par la neige quand j’ai rentré la voiture, habilles -toi vite ». Le temps d’enfiler ma grosse combinaison de ski, mes gants , mes bottes et ma cagoule, je suis dehors avec maman.

Tout le tour du quartier a été fait, en appelant « Amtaro ». La voix de maman commençait à se casser, mais je voyais qu’elle ne voulait pas que je m’angoisse. « Dis Maman , tu crois qu’on va le retrouver??? » « Bien sûr, il n’a pas pu aller loin par ce froid et tu sais qu’au bout de 10m il fait à chaque fois une pause, il n’est forcément pas loin ». Il n’y a pas de traces de pattes dans la neige car la rue a été dégagée au chasse-neige dans l’après-midi . « Il a pu aller en forêt, nous allons refaire la balade habituelle » Elle en a de bonnes, des idées, Maman. La forêt de nuit, là j’ai vraiment la trouille. Seul le faisceau lumineux de la lampe torche éclaire la neige. Un oiseau s’envole à notre approche et fait tomber la neige des sapins. Je tiens de plus en plus fort la main de maman. Nous allons jusqu’au tunnel qui passe sous la nationale et là je suis vraiment mais alors vraiment mort de peur. J’ai envie de faire pipi et je sens le liquide chaud qui coule le long de ma jambe. Ouf heureusement , mon pyjama absorbe tout… Mais je ne suis pas très fier!!!

Nous faisons demi-tour et repartons refaire un plus grand tour de quartier. « Amtaro, Amtaro.. » Un entrepôt artisanal a encore de la lumière, « Amtaro, Amtaro » L’artisan nous entend crier et se précipite dans sa voiture et part …..en direction opposée!!! Je suis furieux mais peut-être ne nous a-t-il pas entendus??, Ici, les maisons sont espacées et ont toutes un grand jardin autour. Il s’agit d’une ancienne zone artisanale et maintenant les artisans sont à la retraite dans leurs grandes maisons. Deux maisons plus loin, quelqu’un écarte son rideau en nous entendant hurler et se réfugie à l’abri de sa maison. Quelques lumières aux fenêtres, il est 20h et personne, mais alors personne ne répond à notre appel ou simplement nous demande ce qui nous arrive. Ma mère habite ce quartier depuis plus de 20 ans et rien, aucune aide, même pas un voisin qui s’informe par sa fenêtre . Le désert blanc et orange de plus en plus glacial me transperce. J’ai froid et j’ai le nez qui se met à couler. C’est normal il fait au moins « moins 8000°C!!!. J’ai peur pour Amtaro, car il ne pourra pas passer cette nuit sans un abri!!! Il va mourir mon Amtaro, non ce n’est pas possible. J’ai l’impression de vide, d’extrême solitude, de malheur. Mon Amtaro où es-tu??? Je commence à tousser,, une toux sèche irritante. Maman ne m’entend pas, elle aussi est terrifiée par la mort qui rode autour de notre compagnon. Il faut absolument le retrouver et vite. Allez encore cette dernière rue, mais c’est impossible qu’il soit allé aussi loin . Cette rue n’est pas éclairée, le lampadaire est en panne et moi j’ai vraiment mais alors vraiment les « chocottes » .

J’entends des crissements sur la neige glacée et un faisceau lumineux croise le notre. Un monsieur au bout du chemin est accompagné d’un chien? « C’est à vous ce chien??? il est perdu et je l’ai retrouvé assis au milieu de la grande route, avant d’appeler la gendarmerie je me suis dit que c’était sûrement un chien qui s’était sauvé de chez lui, car en ce moment pas moyen de fermer correctement les portails à cause de cette neige » « Amtaro, Amtaro, Mon Am  » je m’effondre à coté de lui en entourant son cou de mes bras tremblants. Je suis en pleurs et Maman aussi . « Merci, merci, vraiment merci  » maman n’arrive pas à prononcer d’autres mots. « Vous savez vous devriez lui mettre une médaille sur son collier »  » Mais il en a une …. et non, elle a du se défaire en grattant le museau dans la neige!!! » Amtaro n’a même plus la force de remuer la queue et nous repartons doucement à la maison. Je ne peux pas m’empêcher de faire des sauts de joie et de gambader autour.

Maman lui fait boire du lait tiède car il adore ça et Amtaro s’effondre en gémissant dans son panier.
Je suis tellement, mais alors tellement heureux que je me mets à tousser, à tousser. Je n’arrive pas à reprendre ma respiration. On dirait que l’air est bloqué dans mes poumons. Je me mets à siffler, à pleurer, je n’arrive même pas à appeler maman qui est dans la cuisine, la pièce juste à côté.
Elle est partie me faire un « vrai » chocolat chaud, celui dont les carrés fondent dans la chocolatière et que l’on remue avec un gros pilon en bois à travers le couvercle troué. Enfin, elle arrive avec un grand plateau et les tasses fumantes ainsi que des tartines de beurre et de miel , le miel c’est les abeilles de mon papy qui le font . Maman change de couleur et devient encore plus pâle qu’avant . « Tu es en train de faire une crise d’asthme, calme-toi je vais chercher mon broncho dilatateur.  » Elle me fait respirer à travers un long tube de plastique et l’air repasse un peu dans mes poumons. « Tu sais moi aussi je fais de l’asthme, alors ne t’ inquiètes pas,  » me dit-elle en me serrant dans ses bras.

Cette nuit je l’ai passée dans le lit de maman, avec deux oreillers sous mon dos, presque assis. Au matin Maman m’a conduit chez le médecin qui a dit que j’ai fait une crise d’asthme, Maman me l’a déjà dit avant et le Docteur m’a donné d’autres médicaments à prendre et des examens à faire.
Au final, les responsables de cette crises étaient l’addition du froid , de l’angoisse, de la marche pendant une heure dehors, de la peur et surtout la joie d’avoir retrouvé mon chien .

Je ne savais pas que le bonheur pouvait rendre malade.!!!

 

 

ALLERGIQUE ?
Histoires et nouvelles pour petits et grands.

Le printemps.
L’allergie est une maladie mondiale en forte expansion.
Cet ouvrage aborde l’allergie par le biais de petites histoires. Le vécu de l’allergique, ses difficultés au quotidien sont décryptés afin de mieux connaître et par conséquent de mieux combattre ce fléau : l’allergie. De nombreux conseils, astuces sont donnés pour identifier et éviter l’allergène responsable des symptômes présentés.

L’auteure nous emmène dans un monde allergique vivant, drôle, émouvant, à travers des scènes imaginaires ou de la vie quotidienne.
Ces courtes histoires sont rythmées par les saisons en commençant par le printemps.

Michèle PIPART est médecin allergologue et exerce depuis 1989 l’allergologie dans son cabinet libéral. Elle est également diplômée en Sophrologie relaxation.

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